L’entreprise Eiffage Construction devant la justice pour homicide et blessure involontaires après le décès d’un ouvrier sur le chantier de l’ESNAM à Charleville-Mézières
Le 5 mars 2015, peu avant 9 heures, les enquêteurs de la police étaient appelés au 20 avenue Jean Jaurès, à Charleville-Mézières, pour la chute d’un ouvrier du haut d’un toit. A leur arrivée, un homme est au sol, en position latérale de sécurité. L’ouvrier de l’entreprise Eiffage Construction, intervenait sur un chantier au sein de l’Ecole Supérieure Nationale des Arts de la Marionnette.
Sur place, le chef de chantier expliquait aux enquêteurs que l’accident était intervenu alors qu’un câble électrique devait être tiré sur 300 mètres, depuis un transformateur situé avenue Georges Corneau (face à la Gare), vers le bâtiment. Les ouvriers avaient alors tiré ce câble en passant par la copropriété Arduinna, devant la CCI des Ardennes puis passé sur un toit afin d’alimenter le chantier. Le toit en question se trouvait être le toit d’un parking, fait de taule « semblant pouvoir supporter le poids d’un homme » et de plaques de PVC, plus fines et plus fragiles, en guise de puits de lumière.
Un électrotecnicien, sur les deux présents sur le chantier, montait sur le toit (l’autre estimant qu’il était trop lourd pour monter). Il était accompagné d’un ouvrier et d’un chauffeur poids lourd livrant du matériel, venu prêter main forte. Alors que le câble avait dévié de sa trajectoire en se prenant dans un ergot, le chauffeur poids lourd, Sylvain, avait pris l’initiative de libérer le câble, mais avait traversé une des plaques de PVC. Il s’était retenu in-extrémis à la charpente métallique, se blessant à l’épaule (45 jours d’ITT). Son collègue, ouvrier, avait alors reculé, avait posé le pied sur une plaque de PVC, chutant à son tour. Sa tête avait heurté le sol 3 mètres plus bas et il était décédé 8 jours plus tard des suites de traumatismes thoracique et crânien.
Suite à l’accident, l’inspection du travail relevait plusieurs manquements, notamment le manque de prise en compte, par l’entreprise, des moyens de sécurité pour le travail en hauteur de plus de 3 mètres et l’absence de formation des salariés pour ce type de travaux. L’espace restreint sur place n’avait en effet « pas permis d’y installer une nacelle », et « la fragilité du mur n’avait pas permis d’y installer un point d’ancrage pour les harnais de sécurité ». Les salariés étaient donc montés sur le toit sans aucune sécurité si ce n’est leur casque de chantier, et sans avoir reçu la moindre consigne de sécurité avant de monter.
Ce lundi 13 novembre, l’entreprise Eiffage Construction, Lorraine et Champagne-Ardenne, était jugée devant la chambre correctionnelle du tribunal judiciaire des Ardennes, pour homicide involontaire et blessures involontaires dans le cadre du travail. Comparaissait également Quentin, 35ans, Conducteur de Travaux sur le chantier de l’ESNAM.
Dans l’attente du délibéré du tribunal, Magali Josse, Procureure de la République, a requis la peine maximale légale envers les deux sociétés, soit une amende de 225 000 euros pour Eiffage Champagne-Ardenne et 7 500 euros pour Eiffage Lorraine. Pour le conducteur de travaux, la Procureure a requis la peine de 12 mois d’emprisonnement avec sursis. Le tribunal rendra sa décision le 18 décembre prochain.
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